vendredi 18 mars 2011

Facteurs étiologiques généraux de la pathologie pulpodentinaire

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pathologie pulpodentinaire
Certaines pathologies générales peuvent avoir des conséquences sur la pulpe et la dentine. Au
niveau pulpaire, elles peuvent provoquer des nécroses, des calcifications et des métaplasies. Au niveau
dentinaire, un excès ou un défaut de dentinogenèse et/ou de minéralisation sont observés. Une revue de la
littérature récente permet d’évoquer les diverses pathologies pulpodentinaires et les mécanismes
pathogéniques en cause induits par le diabète non contrôlé, l’athérosclérose, l’hyperbilirubinémie, les
pathologies rénales chroniques, l’oxalose, l’anachorèse, les troubles de la parathyroïde, l’hypervitaminose D,
la sclérodermie, certaines tumeurs malignes, des maladies génétiques comme les rachitismes héréditaires,
l’hypophosphatasie, l’ostéogenèse imparfaite et divers syndromes héréditaires rares, les carences diététiques
en ions et en vitamines, les intoxications mercurielles, l’infection fongique à Candida, le zona, la lèpre, ainsi
que divers traitements généraux (glucocorticoïdes, tétracyclines, suppléments fluorés et traitements
anticancéreux).

Introduction
Les facteurs locaux responsables des pathologies pulpaires, ainsi que
des altérations dentinaires, sont généralement bien connus des
cliniciens. En revanche, les étiologies générales susceptibles d’être
impliquées dans ces phénomènes leur sont beaucoup moins
familières et ne sont donc que rarement évoquées dans le diagnostic
étiologique des pulpopathies.
Pourtant, les progrès de la médecine ces dernières décennies
permettent de maintenir en vie des malades, en particulier des
enfants, atteints de pathologies autrefois fatales. Ces patients, malgré
des handicaps parfois lourds, ont maintenant besoin de soins
dentaires et il importe de connaître les répercussions de ces
pathologies sur leur état buccodentaire, et notamment pulpaire, afin
d’adapter nos traitements.
Si de nombreux travaux de recherches cliniques et fondamentales
ont porté sur l’influence des lésions dentaires sur les pathologies
générales (infections focales, endocardites bactériennes, rôles des
parodontopathies sur l’évolution des maladies systémiques…),
l’intérêt des chercheurs est nettement moins axé sur la manière dont
une maladie générale peut avoir une répercussion sur la santé
pulpodentinaire. Une revue de la littérature récente permet de faire
la part de ce qui relève dans ce domaine des lieux communs non
prouvés scientifiquement et de ce qui peut être étayé et expliqué par
des études cliniques ou des protocoles expérimentaux
reproductibles. Nous limiterons ce travail sur les étiologies générales
des pathologies pulpodentinaires aux seuls facteurs endogènes,
c’est-à-dire provenant directement de pathologies générales propres
aux patients ou consécutives à leurs traitements, en excluant donc
tout ce qui est en rapport avec des étiologies exogènes, liées à
l’environnement (barotraumatismes, variations thermiques,
irradiations…). De même, nous n’évoquerons pas ce qui résulte de
phénomènes physiologiques, tels que le vieillissement, ainsi que de
pathologies héréditaires n’affectant que les seuls tissus dentaires.


Pathologies pulpodentinaires
Le tissu pulpaire est un tissu conjonctif spécialisé, fibreux, qui assure
les fonctions dentinogénétiques, nutritives, sensorielles et de défense
de la dent. La palissade d’odontoblastes située en périphérie de la
pulpe contrôle les mouvements et la composition ionique du fluide
présent dans les tubuli dentinaires et intervient dans la sécrétion et
le transport des composants nécessaires à la dentinogenèse. La
formation de la dentine qui est sous le contrôle de nombreux
facteurs systémiques (hormones et vitamines) et locaux (facteurs de
croissance) passe par la synthèse d’une couche de prédentine
essentiellement composée de collagène de type I qui se minéralise
secondairement. La minéralisation de la prédentine dépend de la
concentration locale en phosphates, en calcium et en protéines
spécifiques. Une pathologie générale qui provoque une perturbation
des ions, des hormones, des vitamines et de la matrice impliqués
dans la dentinogenèse peut donc entraîner un manque ou un excès
et/ou des malformations de la dentine.
La vascularisation pulpaire est terminale, il n’existe pas de
circulation collatérale et l’ensemble du paquet vasculonerveux
pénètre dans la pulpe par le foramen apical. Une pathologie
vasculaire d’ordre général pourra donc avoir des répercussions
dramatiques sur le tissu pulpaire et par voie de conséquence, sur la
dentinogenèse.
Toute irritation de l’organe pulpodentinaire entraîne inévitablement
une inflammation pulpaire aiguë ou chronique dont l’évolution
dépend de l’intensité et de la duréedel’agression, mais également
de l’état préalable de la pulpe. L’atteinte pulpaire peut évoluer en
fonction de facteurs étiologiques généraux (maladies, traitements)
qui provoquent soit une irritation pulpaire en tant que telle, soit une
diminution des capacitésdedéfense ou de régénération de la pulpe.
De plus, sans étiologie locale associée, la pulpe dentaire peut subir
chez des patients atteints de pathologies générales, une
dégénérescence de différentes natures : une fibrose pulpaire
caractérisée par un nombre élevé de fibroblastes et une synthèse
exagéréede fibres matricielles, une dégénérescence calcique avec des
calcifications (pulpolithes) plus ou moins importantes dans la pulpe
camérale et radiculaire, responsables d’un rétrécissement de l’espace
canalaire, et une dégénérescence nécrotique aboutissant à une
nécrose de la pulpe, accompagnéeengénéral de complications
périapicales. Une pathologie générale peut également entraîner une
métaplasie pulpaire à l’origine de résorption dentinaire interne.
Enfin, des mécanismes de défense inappropriés (sur des dents ne
présentant ni carie, ni traumatisme) peuvent se produire dans la
pulpe (dentine tertiaire) et au niveau de la dentine (formation de
dentine sclérotique par fermeture des tubuli).

Pathologies générales et leurs conséquences pulpodentinaires
DIABÈTE
Le diabète sucré est une maladie qui touche le métabolisme des
hydrates de carbone et des lipides. Cette pathologie est causée par
un trouble de la sécrétion ou de la fonction d’une hormone,
l’insuline, provoquant une augmentation de la glycémie. Il existe
deux types de diabètes. Le diabète de type I, associéà une anomalie
ou à l’absence des cellules qui produisent l’insuline, cellules bêta
localisées dans les îlots de Langerhans du pancréas, apparaît chez
l ’enfant ou l ’adolescent. Le diabète de type I est dit
insulinodépendant car les malades ont besoin d’un apport d’insuline
exogène pour survivre. En absence d’un traitement régulier, les
malades peuvent développer une acidose grave avec comas et
diverses lésions dégénératives. Le diabète de type II, appelé non
insulinodépendant ou diabète gras est plus courant. Il est dûà une
diminution de la fonction des cellules bêta ou à une résistance à
l’insuline. Les malades atteints de diabète de type II ne peuvent pas
développer d’acidose grave et leur traitement consiste à stimuler la
sécrétion d’insuline. Classiquement, le diabète de type II apparaît à
partir de 50 ans mais un surpoids peut provoquer un diabète dès
l’enfance.
Quel que soit le type de diabète, l’excès de glucose dans le sang
provoque de nombreux troubles vasculaires. Tous les vaisseaux sont
atteints, de l’aorte aux fins capillaires. L’hyperglycémie provoquée
par un diabète non contrôlé entraîne une déshydratation cellulaire
et la formation excessive d’hémoglobine glycosylée(HbA1c) moins
efficace dans le transport de l’oxygène et responsable de
l’épaississement de la membrane basale des capillaires. Cette
modification a des conséquences sur la réponse immunitaire. Elle
diminue la réponse leucocytaire et entrave le rôle antibactérien des
polymorphonucléaires (PMN). Les diabétiques ne sont pas plus
sujets aux infections bactériennes mais présentent une plus grande
probabilité de développer une infection grave en raison de cette
diminution de la réponse immunitaire mais aussi de l’augmentation
de la teneur en sucre dans la région pathologique qui peut accélérer
la multiplication bactérienne.


ATHÉROSCLÉROSE
L’athérosclérose est une pathologie dans laquelle l’obstruction de la
lumière des artérioles par des plaques athéromateuses (dépôts
lipidiques) provoque une ischémie et une dégénérescence tissulaire.
Les patients souffrant d’athérosclérose coronaire présentent un plus
grand nombre de dents avec des calcifications pulpaires que des
patients sains.
Bernick et al.
ont aussi décrit des altérations
pulpaires athérosclérosiques (calcification, nécrose), mais ces études
portent sur des patients âgésde40 à 70 ans et il est connu que l’âge
provoque des modifications considérables au niveau des vaisseaux
pulpaires. L’effet de l’athérosclérose seule sur la pulpe dentaire n’a
pas été confirmé chez l’animal. Oguntebi et al.
ont mis en évidence
un rétrécissement des artérioles pulpaires sur des porcs miniatures
présentant une hypercholestérolémie induite. Des plaques
d’athéromes ont été observées mais la forte concentration de
cholestérol n’a jamais provoqué d’obstruction vasculaire complète
au sein de la pulpe. De même, aucun changement dégénératif
(nécrose ou calcification) n’a été décelé dans les tissus pulpaires
examinés.
L’absence d’altération pulpaire a été confirmée sur des
singes sur lesquels une arthérosclérose a été induite
expérimentalement.
Il semble donc que les artérioles pulpaires ne
soient pas propices au dépôt athéromateux.


HYPERBILIRUBINÉMIE La bilirubine est le pigment jaune rougeâtre présent entre autres
dans la bile et le sérum. Elle provient de la dégradation de
l’hémoglobine par perte du fer. Dans les cas d’anémie hémolytique
précoce à bilirubine indirecte dont l’origine peut être une
incompatibilité de types sanguins Rhésus fœtomaternelle ABO
(érythroblastose fœtale),
ou dans les pathologies provoquant des
dysfonctions hépatiques ou biliaires ainsi que dans les pathologies
qui déclenchent une hémolyse, l’excès de bilirubine provoque des
colorations des dents temporaires. La bilirubine pénètre dans la
dentine donnant une couleur jaune, brune, grise ou bleutée. Les
dents prennent une couleur verdâtre lorsque la bilirubine absorbe la
lumière bleue et s’oxyde en biliverdine. Ces colorations
particulièrement visibles au niveau radiculaire s’estompent avec
l’âge.

PATHOLOGIE RÉNALE CHRONIQUE
Lors des pathologies rénales, quelle qu’en soit l’origine, primaire ou
secondaire à un diabète, à une hypertension ou à une
glomérulonéphrite, le processus pathologique conduit à une
détérioration puis à une destruction des néphrons. Une des
conséquences de la perte de la fonction des néphrons est une
diminution de la filtration des glomérules rénaux, provoquant une
augmentation de la concentration en phosphate dans le sérum.
L’excès de phosphate entraîne une incorporation du calcium dans le
tissu osseux par régulation homéostasique. Il en résulte une
diminution de la concentration du calcium dans le sérum qui
stimule la glande parathyroïde. Un autre effet des pathologies
rénales est l’impossibilité de produire la forme active de la vitamine
D (1,25-dihydroxyvitamine D3), ce qui entraîne une diminution de
l’absorption intestinale du calcium et une sécrétion continue
d’hormone parathyroïdienne. Des troubles osseux (ostéodystrophie
rénale) de type ostéomalacie, ostéite fibreuse généraliséeou
ostéosclérose apparaissent alors. Après une greffe de rein, toutes les
valeurs redeviennent normales.
Au niveau dentaire, les patients
souffrant de pathologies rénales chroniques ayant subi une
transplantation rénale présentent des calcifications pulpaires et un
rétrécissement de la chambre pulpaire par excès de dentinogenèse
secondaire.
Il est possible que le traitement
immunosuppresseur à base de glucocorticoïdes administré aux
patients ayant subi une greffe rénale soit responsable du
rétrécissement de la chambre pulpaire.
Mais il est observé un
épaississement de la prédentine sur des patients insuffisants rénaux
chroniques n’ayant reçu aucun traitement à base de corticoïdes.
L’excès de production de prédentine irrégulière est aussi expliqué
par l’hypophosphatémie et le rachitisme dus à la déficience en
vitamine D3 ou par l’hyperparathyroïdisme observé lors d’une
insuffisance rénale chronique.
Les affections rénales peuvent être associées à une ostéomalacie due
à une contamination par l’aluminium dans l’eau de dialyse ou à la
conséquence d’un traitement à base de sel d’aluminium prescrit
pour réguler le phosphate. Quoi qu’il en soit, l’aluminium
s’accumule au front de minéralisation des tissus calcifiésoù il
pourrait inhiber la minéralisation. De plus, une oxalose secondaire
en association avec une intoxication en aluminium serait responsable
de la perte des dents à la suite de résorptions radiculaires internes
et externes.

HYPEROXALURIE ET OXALOSE
L’hyperoxalurie, qu’elle soit primaire (maladie héréditaire rare dont
le mode de transmission est autosomique récessif) ou secondaire à
une pathologie rénale, provoque un dépôt de cristaux d’oxalate de
calcium appelé oxalose dans les tissus conjonctifs extrarénaux. La
forte concentration en oxalate plasmatique et les altérations de la
perméabilité vasculaire seraient responsables de la formation de ces
cristaux.
L’hyperoxalurie primaire est caractérisée par des
altérations rénales graves (néphrolithiases, néphrocalcinose et
précipitations de cristaux d’oxalate dans les reins) nécessitant des
dialyses et à terme une transplantation rénale. Chez des patients qui
présentent une hyperoxalurie primaire, des manifestations dentaires
comme des douleurs et des résorptions apparaissent, mais
uniquement avec une pathologie rénale chronique associée.
Hedemark
a montré, sur une patiente de 25 ans qui souffrait
d’une hyperoxalurie primaire, la présence de cristaux d’oxalate dans
la pulpe dentaire fibrosée. Cette patiente ne présentait aucune
pathologie dentaire jusqu’à l’âge de 18 ans, puis un traitement
orthodontique a été mis en œuvre et sans que ce traitement puisse
être incriminé, de nombreuses résorptions dentaires sont apparues.
Pendant le traitement orthodontique, cette patiente a subi deux
greffes rénales puis une greffe rein-foie.
Dans d’autres cas
similaires, la présence de cristaux d’oxalate a été décrite dans la pulpe dentaire mais aussi au niveau de la prédentineetdeladentine
tertiaire.
Des zones de résorption interne sont comblées par de
l’ostéodentine qui s’étend dans la pulpe et qui contient des cristaux
d’oxalate. Enfin, des pulpolithes formés autours des cristaux
d’oxalate de la pulpe fusionnésavecl’ostéodentine provoquent de
larges calcifications intrapulpaires.
L’étiopathogénie de ces lésions pulpaires pourrait être
l’hypovitaminose d’origine rénale qui induit à son tour un déficit en
ostéopontine, glycoprotéine phosphorylée connue pour inhiber la
formation de cristaux d’oxalate de calcium.
La réaction
granulomateuse inflammatoire induite par les cristaux d’oxalate de
calcium dans la pulpe serait à l’origine des résorptions internes des
dents
et des douleurs pulpaires.

ANACHORÈSE
L’anachorèse est la localisation et la fixation, dans des zones
inflammatoires, de micro-organismes provenant d’une autre source
et véhiculés par voie sanguine.
Il a été prouvé que les réactions
inflammatoires causées par les soins dentaires sont capables d’attirer
vers la pulpe, par voie hématogène, des micro-organismes issus
d’une pathologie infectieuse éloignée de la dent.
Chez le chien, 24 heures après une injection intraveineuse d’une
suspension de streptocoques a, aucun micro-organisme n’est décelé
dans les pulpes contrôles non enflammées ; en revanche, dans toutes
les pulpes ayant subi un coiffage direct à l’hydroxyde de calcium et
présentant donc une inflammation, la pulpe est infectée par des
micro-organismes identiques à ceux qui ont été injectés par voie
sanguine. Les auteurs en concluent que les pulpes non
inflammatoires n’attirent pas les bactéries par voie anachorétique et
que l’action chimique de l’hydroxyde de calcium peut être
considérée comme un facteur favorisant l’infiltration vers la pulpe
de bactéries issues du sang.
Le processus d’anachorèse explique comment la pulpe dentaire peut
développer des nécroses ou des pulpites « a retro » sans carie et sans
infiltration bactérienne à partir d’une infection à distance sur des
patients souffrant de pathologie générale comme le diabète.


TROUBLES DE LA PARATHYROÏDE
La parathormone (PTH) est une hormone qui agit à deux niveaux :
le tissu osseux où elle régule le remodelage osseux, et les reins où
elle augmente la sécrétion de phosphate et inhibe la sécrétion de
calcium. De plus, la PTH catalyse l’hydroxylation de la vitamine D
qui à son tour contrôle la minéralisation et l’absorption intestinale
du calcium.

Hyperparathyroïdisme Une hyperparathyroïdie primaire est le plus souvent engendrée par
un adénome bénin de la glande parathyroïde. L’hyperparathyroïdie
secondaire à une anomalie rénale mobilise à la fois le calcium et le
phosphate à partir du tissu osseux.
Sur une patiente de 18 ans, une calcification complète de la pulpe a
été observée sur deux dents ne présentant que de petites lésions
carieuses.
L’hyperparathyroïdisme a étéévoqué pour expliquer
l’apparition de ces calcifications pulpaires ; cependant, dans ce cas,
toutes les valeurs biologiques étant normales, l’origine de ces
calcifications semble idiopathique.
De plus, de nombreuses recherches ont montré que les hormones
qui régulent la calcémie jouent un rôle important dans la
minéralisation de la dentine. Chez la souris, une forte dose de PTH
n’a pas d’effet sur la différenciation des cellules mésenchymateuses
en préodontoblastes mais interfère avec la cytodifférenciation des
préodontoblastes en odontoblastes et inhibe la formation de
prédentine.

Hypoparathyroïdisme Les dents de patients atteints d’hypoparathyroïdie, de candidose et
de retard mental ont été examinées. Tous les malades présentaient
une concentration sérique en calcium très basse et un taux en
phosphate très élevé. Au niveau dentinopulpaire, des cavités
pulpaires larges dues à une hypoplasie résultant d’un arrêtdela
dentinogenèse sont décrites ainsi que l’obstruction des chambres
pulpaires par de l’ostéodentine. Cependant, il est difficile de savoir
si ces anomalies sont dues directement à l’hypoparathyroïdisme.
Un défaut de minéralisation par la formation de dentine
interglobulaire au niveau radiculaire est rapporté dans les cas de
pseudohypoparathyroïdisme, maladie due à l’absence de réponse
des cellules osseuses et rénales à la PTH et dans les cas
d’hypoparathyroïdisme idiopathique où les anomalies dentinaires
sont associées à des infections pulpaires répétées liées à Candida.

HYPERVITAMINOSE D
La fonction biologique principale de la 1,25-dihydroxyvitamine D
est de maintenir une concentration normale en calcium et en
phosphate dans le sérum afind’assurer les fonctions cellulaire
essentielles et de permettre la minéralisation des tissus durs. Le
besoins en vitamine D sont en général fournis par l’alimentation e
l’exposition aux rayonnements solaires. Giunta [28]
décrit un cas rar
d’hypervitaminose D due à un excèsd’absorption de lait enrichi en
vitamine D, chez un enfant de 7 ans qui présente de nombreux
troubles digestifs et des calcifications ectopiques. L’excèsde
vitamine D a entraîné une hypercalcémie marquée et prolongée due
à une accélération de l’absorption intestinale et à une résorption du
tissu osseux. Au niveau pulpaire, il est noté l’apparition de
calcifications.
De même, des ponts radio-opaques sont observé
au niveau des chambres pulpaires de toutes les incisive
permanentes maxillaires et mandibulaires dans un ca
d’hypercalcémie iatrogène d’un enfant atteint d’ostéodystrophie
rénale et traité par de trop fortes doses de vitamine D.
Chez l’animal, en plus des calcifications pulpaires, une déformation de
racines, un vieillissement prématuré du complexe pulpodentinair
et la formation d’ostéodentine ont été mis en évidence.
Pou
mieux comprendre les mécanismes responsables de ces excèsde
minéralisation dentaire, il a été montré sur des cultures de cellule
pulpaires que la vitamine D augmente la synthèse d’ostéopontine
associée à la formation de dentine de réparation et à l’apparition de
calcifications pulpaires.

SCLÉRODERMIE
La sclérodermie est une maladie des tissus mésenchymateux
caractérisée par une prolifération excessive de collagène dans les
tissus sous-cutanés. Cette pathologie, plus fréquente chez la femme,
se développe sur un mode chronique. Plusieurs étiologies de la
sclérodermie ont été proposées, des facteurs neurotrophiques, une
anomalie fonctionnelle de la glande thyroïde mais aussi certaines
conditions atmosphériques, des intoxications médicamenteuses, des
infections aiguës ou des réactions allergiques. Au niveau dentaire,
la fermeture localisée des tubuli dentinaires entraîne une diminution
du nombre des tubuli principalement à proximité de la chambre
pulpaire. Une étude en microanalyse montre de nombreuses
modifications de la composition minérale de la dentine avec une
augmentation du taux de phosphate, la disparition du magnésium
et une modification du rapport calcium-phosphate.

TUMEURS MALIGNES
Lymphome de Burkitt Le lymphome de Burkitt est un lymphome malin constitué par la
prolifération des cellules souches lymphoïdes et frappant
les adolescents de certaines régions d’Afrique, mais il existe une forme
européenne. Le virus Epstein-Barr (agent étiologique de la
mononucléose infectieuse) serait co-responsable de ce lymphome qui
se développe dans les maxillaires en envahissant les tissus mous.
Dèsledébut de la maladie, les études histologiques montrent que
les papilles dentaires des dents voisines sont envahies par le
processus lymphomateux. La tumeur pénètre dans la papille
dentaire par l’apex provisoire et progressivement les cellules
lymphoïdes remplacent les cellules pulpaires.
Face aux traitements chimiothérapiques, le lymphome de Burkitt régresse
rapidement et le tissu osseux se régénère autour des dents mais
l’examen histologique des dents après traitement montre une
dentine irrégulière avec une démarcation entre la dentine normale,
formée avant la maladie et la dentine formée pendant la maladie.
Cette démarcation peut être une bande étroite de dentine moins
minéralisée ressemblant à de la prédentine. Dans les dents en cours
d’évolution pendant le lymphome, après le traitement, dans la
majorité des cas, le diaphragme épithélial est préservé,la
dentinogenèse radiculaire se poursuit normalement et une pulpe
saine est observable. Si le diaphragme épithélial est détruit, une
fibrose pulpaire se produit. La formation de dentine normale après
le traitement est le signe de la présence d’odontoblastes sains qui
ont pu remplacer les odontoblastes détruits lors du processus
métaplasique. Une déformation de la racine après traitement et
guérison du lymphome est souvent observée et peut être considérée
comme une preuve indirecte de l’envahissement de la papille par la
tumeur.

Infiltration métastatique
Un cas de métastase maxillaire envahissant la pulpe dentaire a été
récemment décrit
à partir d’un médulloblastome, la plus
fréquente des tumeurs cérébrales chez l’enfant, représentant 15 à
20 % des tumeurs pédiatriques. Les métastases extracérébrales de
ces tumeurs sont rares. Dans le cas de ce jeune enfant, la
radiographie panoramique permet d’observer la présence d’une
image radioclaire autour de certaines dents. L’examen histologique
révèle une importante infiltration de la pulpe dentaire des dents
temporaires et de la papille des dents définitives en formation par
des cellules tumorales.
La destruction de la pulpe par des métastases périapicales dans le
cas d’une tumeur maligne a été décrite sur une femme de 45 ans.
Une biopsie de la pulpe et du périapex des dents présentant des
images radioclaires périapicales a révélé que la lésion périapicale
contenait des cellules métastatiques alors que les fragments
pulpaires présentaient des calcifications, des cellules pycnotiques et
n’avaient plus de vascularisation. Contrairement au cas précédent,
les modifications néoplasiques sont restées confinées dans les
maxillaires et n’ont pas envahi la pulpe dentaire. La destruction de
la pulpe serait la conséquence de l’arrêt de la circulation sanguine
pulpaire dûà la prolifération des cellules tumorales au niveau
périapical.

MALADIES GÉNÉTIQUES
Rachitisme héréditaire
Rachitisme hypophosphatémique vitamine D-résistant (HVDRR)
Il existe deux types d’hypophosphatémie héréditaire appelée aussi
rachitisme familial résistant à la vitamine D : l’hypophosphatémie
liée à l’X (HLX), cas le plus courant de rachitisme héréditaire dans
lequel le trouble de la réabsorption du phosphate au niveau rénal
provoque une hypophosphatémie avec un rachitisme sévère, une
ostéomalacie et une synthèse anormale de dihydroxyvitamine D3 et,
d’autre part, la maladie osseuse hypophosphatémiante autosomique
dominante (HBD), pathologie héréditaire dans laquelle le trouble de
réabsorption rénale, différent de celui de l’HLX, entraîne des
anomalies osseuses mais pas de rachitisme uniforme bien que le
niveau de phosphate dans le sérum soit aussi faible.
Les signes dentaires de ces deux syndromes sont un émail normal
mais fin, une cavité pulpaire élargie avec des cornes pulpaires qui
s’étendent jusqu’à la jonction émail/dentine et un taurodontisme.
La taille anormale de la pulpe est la conséquence d’une dysplasie de
la dentinogenèse secondaire et/ou d’une déficience de la
minéralisation (dentine interglobulaire).
Un excès de zinc dans les espaces interglobulaires pourrait expliquer ce trouble de la
minéralisation dentinaire.
En effet, contrairement au tissu osseux, le déficit en phosphate ne semble pas être la cause principale
des défauts de minéralisation dentinaires, tandis que le zinc, connu
pour inhiber la minéralisation dentinaire et observé en excès dans
les espaces interglobulaires sur un modèle de souris HLX, jouerait
un rôle déterminant.
Les malades atteints d’HLX et d’HBD présentent tous des anomalies
dentaires mais à des degrésdifférents, alors que l’hypophosphatémie
est similaire. De plus, les lésions pulpodentinaires sont observables
même lorsque les malades ont un traitement dèsl’enfance qui
permet de restaurer le taux de phosphate sérique à des valeurs
normales.
Il a été démontré que les anomalies dentaires observées
dans les cas d’HLX sont la conséquence de deux processus séparés,
l’un qui est dûà l’hypophosphatémie d’origine rénale, l’autre
affectant directement la dentinogenèse secondaire.
Une fois
induite génétiquement, la dentinogenèse secondaire est continue,
lente et régulière et ne semble pas dépendre de la concentration en
phosphate.
Des nécroses pulpaires (dans 40 % des cas d’HBD, 50 % des HLX
chez la femme et 100 % des HLX chez l’homme) et des abcèsau
niveau de dents temporaires et définitives non cariées sont décrits
sans que la cause de ces abcès soit clairement définie.
Au niveau des dents temporaires, la faible épaisseur d’émail puis
l’envahissement bactérien de la dentine hypominéraliséeou
l’attrition amélaire entraînant une exposition pulpaire au niveau des
cornes pulpaires effilées pourraient expliquer la nécrose pulpaire
alors que sur les dents définitives, les abcès sont inexpliqués.
La progression des micro-organismes dans les défauts microscopiques
de l’émail et de la dentine semble une hypothèse probable.
Bien que ces abcès dits « spontanés » apparaissent dèsl’âge de 2 ans,
l’intérêt de pulpotomies prophylactiques chez les jeunes patients
atteints de rachitisme résistant à la vitamine D a été discuté
et depuis 2002, ce traitement n’est plus recommandé.
Dans la pathologie liée à l’X, les anomalies dentaires sont plus
accentuées chez les hommes que chez les femmes (ceci est dûà
l’atténuation du phénotype par l’allèle sain).

Rachitisme vitamine D-dépendant (VDDRI et VDDRII)
La bioactivation de la vitamine D requiert l’activité enzymatique de
la 1a-hydroxylase rénale. La déficience ou l’absence de cette enzyme
est provoquée par une maladie autosomale récessive rare appelée
rachitisme vitamine D-dépendant de type I (VDDRI ou rachitisme
vitamine D-pseudodéficient). Le VDDRII ou rachitisme vitamine
D-dépendant de type II (aussi nommé rachitisme hypocalcémique
vitamine D-résistant) est une autre forme de rachitisme à
transmission autosomique récessive causée par une anomalie du
récepteur à la vitamine D et donc résistante au traitement
vitaminique. Les signes cliniques du syndrome du VDDRI sont
nombreux ; on y retrouve des anomalies squelettiques mais aussi
musculaires et des convulsions. Le bilan biologique révèle une
hypocalcémie, une hypophosphatémie, un taux de PTH élevé et une
forte phosphatase alcaline. Dans le VDDRII, les signes cliniques du
VDDRI sont retrouvés avec en plus une alopécie et un taux élevé de
1,25-dihydroxyvitamine D.
L’étude d’un cas présentant un
VDDRI montre des altérations dentaires avec, au niveau
radiologique, une pulpe dentaire large et des racines courtes et d’un
point de vue histologique, des altérations comparables à celles
décrites précédemment dans le rachitisme hypophosphatémique
vitamine D-résistant. Cependant, il est intéressant de noter qu’il n’a
pas été observé d’abcès. Les signes dentaires du VDDRII sont
identiques à ceux du VDDRI.

 Hypophosphatasie
L’hypophosphatasie est une maladie héréditaire autosomale
récessive provoquant l’absence d’activité phosphatase alcaline
(enzyme qui libère le phosphate en milieu basique). Il existe une
forme infantile de cette maladie où les enfants décèdent avant
l’apparition des premières dents, une forme juvénile et une forme
adulte. Les malades présentent des déformations osseuses
ressemblant à celles du rachitisme.
La dentine radiculaire est
particulièrement affectée. La dentine apicale est très fine avec des
fibres de collagène épaisses, des inclusions de débris cellulaires et
de nombreux espaces interglobulaires. À la radiographie, la pulpe
dentaire de certains patients est extrêmement large, faisant penser à
des « dents en coquillage ».

Ostéogenèse imparfaite
L’ostéogenèse imparfaite est une maladie génétique où la mutation
du gèneCOL1A1oudugène COL1A2 qui codent pour les chaînes
pro-a1etpro-a2 du collagène de type I provoque des altérations de
la minéralisation de cette protéine de la matrice osseuse et
dentinaire. Il existe quatre types d’ostéogenèse imparfaite classésen
fonction des signes cliniques, radiologiques et génétiques ou en
fonction du degré de mobilité du malade. La dentinogenèse
imparfaite de type I est une forme de dysplasie dentinaire associée
à l ’ostéogenèse imparfaite. Il convient de différencier la
dentinogenèse imparfaite de type I de la dentinogenèse imparfaite
de type II, anomalie génétique liée à une mutation au niveau du
gène DSPP dont le phénotype est uniquement dentaire. Tous les
malades atteints d’ostéogenèse imparfaite ne présentent pas de
dentinogenèse imparfaite ; la prévalence de la dentinogenèse
imparfaite chez les patients atteints d’ostéogenèse imparfaite est de 8 à 40 %.
Qu’elle soit de type I ou de type II, les dents des patients atteints de
dentinogenèse imparfaite sont caractérisées par une couleur jaune
(en « sucre d’orge sucé») et un coefficient d’usure très rapide, l’émail
ayant disparu par attrition. Les dents temporaires sont plus atteintes
que les dents définitives. L’aspect radiologique est spécifique avec
des racines courtes, des couronnes bulbeuses dues à une constriction
cervicale et une oblitération de la chambre pulpaire. D’un point de
vue histologique, la dentine présente des zones amorphes
dépourvues de tubuli, ou des tubuli irréguliers et ramifiés, des
inclusions cellulaires et de la dentine interglobulaire. Cependant,
dans la dentinogenèse imparfaite de type I (associée à l’ostéogenèse
imparfaite), ilyadetrès grandes variations en ce qui concerne la
gravité des altérations de la dentine. Malmgren et Lindskog,
en observant un grand nombre de patients atteints d’ostéogenèse
imparfaite, ont mis en évidence une corrélation entre la gravité de
l’ostéogenèse imparfaite et la quantité d’anomalies dentinaires. De
plus, cette étude montre qu’il y a peu de différences entre les dents
d’un même patient, que sur une même dent s’il y a une différence,
l’atteinte radiculaire est toujours plus accentuée que l’atteinte
coronaire, que la dentine circum-pulpaire est plus sévèrement
atteinte que la mantle dentine et que les patients qui présentent une
ostéogenèse imparfaite sans dentinogenèse imparfaite détectable
cliniquement ont des anomalies dentinaires plus importantes que
chez des patients sains.
La corrélation entre la sévérité de l’ostéogenèse imparfaite et les
anomalies dentinaires montre qu’un même défaut génétique de
la biosynthèse du collagène de type I provoque un même degré
d’anomalies de la dentine et de l’os.
 Syndromes héréditaires rares
Syndrome d’Ehlers-Danlos (EDS) de type I
L’EDS de type I est une anomalie héréditaire des tissus conjonctifs
collagéniques caractérisée par une peau hyperélastique,
anormalement fragile, qui a du mal à cicatriser, et des problèmes
articulaires. Dans les cas d’EDS I, la morphologie radiculaire des
incisives mandibulaires est altérée. Les racines sont anormalement
courtes, avec un élargissement de leur partie centrale et une
oblitération de la chambre pulpaire par de la dentine contenant peu
de tubuli et pouvant ressembler à du cément intermédiaire. La
dentine de ces dents peut faire penser à une dysplasie dentinaire de
type I (DDI = type radiculaire). Cependant, dans la DDI, toutes les
racines de toutes les dents sont atteintes de façon homogène alors
qu’ici, les altérations sont variables et plus ou moins importantes.
Comme pour l’ostéogenèse imparfaite, des anomalies du
collagène d’origine héréditaire sont à mettre en cause.

Calcinose tumorale La calcinose tumorale est une maladie métabolique héréditaire rare
(transmise sur un mode autosomal dominant) caractérisée par une
élévation des taux de phosphate et de 1,25-dihydroxyvitamine D
dans le sérum provoquant l’apparition de calcifications tumorales
solides. Au niveau dentaire, les racines sont courtes et bulbeuses, les
calcifications pulpaires entraînent une oblitération plus ou moins
importante de la cavité pulpaire. D’un point vue histologique, la
dentine coronaire et une quantité variable de dentine radiculaire
apparaissent normales. À un moment non spécifique, la dentine
radiculaire en cours de développement rencontre une masse de tissu
calcifié. La dentinogenèse radiculaire se poursuit autour de cet amas
calcifié formé d’espaces ovoïdes entourés de calcifications amorphes.
À ce niveau, la dentine radiculaire est irrégulière.

Syndrome de Kabuki Les malades atteints du syndrome de Kabuki présentent un faciès
similaire aux acteurs traditionnels japonais, un retard mental
modéré, une petite taille et des anomalies squelettiques et
dermatologiques. L’étiologie de ce syndrome reste inconnue ; ce
serait une maladie autosomale dominante avec une expressivité
variable. Au niveau dentaire, les chambres pulpaires des molaires et
des incisives sont larges avec des calcifications. Ces anomalies
dentaires pourraient aider au diagnostic et à la compréhension de la
pathogénie de ce syndrome encore mal connu.

Maladie de Fabry
Cette maladie héréditaire liée à l’X, observée uniquement chez
l’homme, est due à un déficit de l’enzyme a-galactosidase. Les
conséquences sont une accumulation de glycolipides dans les
cellules endothéliales du rein, du cœur, du système nerveux et le
développement d’angiokératomes. Les vaisseaux de la pulpe
dentaire sont, eux aussi, atteints et le collagène dentinaire contient
de larges dépôts de glycolipides et de céramidotrihexosides.

Mucopolysaccharidose (type III : maladie de Sanfilippo, type VII :
syndrome de Dyggve ou syndrome de Sly)

Due à une déficience enzymatique héréditaire affectant le
métabolisme des mucopolysaccharides, la maladie de Sanfilippo
provoque l’oblitération de la chambre pulpaire. En revanche, le syndrome de Dyggve entraîne l’apparition d’hypoplasies
dentinaires.
Une étude sur un modèle de rat atteint de
mucopolysaccharidose de type VII a montré que les cellules qui
présentent une activité de synthèse importante comme les
odontoblastes sont les plus touchées, elles sont dilatées par
l ’accumulation de vacuoles contenant probablement des
glycosaminoglycanes. Il en résulte la formation de fibrilles de
collagène anormales au niveau de la prédentine et des troubles de la minéralisation dentinaire.

Maladie de Günther = porphyrie érythropoïétique
congénitale = uroporphyrie érythropoïétique

Il s’agit d’une maladie à transmission autosomique récessive
caractérisée par des anomalies cutanées de photosensibilisation, par
une anémie hémolytique et des lésions oculaires et osseuses. Les
dents peuvent présenter une coloration rouge-brun ou révéler une
fluorescence rouge en lumière ultraviolette par affinité de la
porphyrie pour les phosphates de calcium de la dentine.
Progeria de Hutchinson-Gilford
Les enfants atteints de progeria ont un vieillissement accéléré. Ils
sont de petite taille et de faible poids, ils ont la peau ridée, les
cheveux blancs et clairsemés, mais ne souffrent jamais de cancers
associés au vieillissement, ni de cataracte ou de sénilité. Le pronostic
vital de cette maladie génétique rare est très mauvais du fait de
l’apparition d’athéromatose précoce et d’insuffisance
endocrinienne.
Au niveau dentaire, la sclérose des tubuli
dentinaires et la formation de dentine secondaire caractéristique des
dents des personnes âgées aboutissent à une oblitération pulpaire
et à une coloration brun jaunâtre des dents.
Drépanocytose C’est une anomalie héréditaire du sang, transmise selon le mode
autosomique récessif, caractérisée par la présence d’une
hémoglobine anormale qui déforme les globules rouges qui
prennent alors un aspect de faucille. Si les deux chromosomes sont
atteints, la drépanocytose peut provoquer une anémie hémolytique
très grave mais aussi des infections bactériennes et des crises de
douleurs vaso-obstructives.
Les hématies déformées peuvent en
effet provoquer une occlusion des capillaires, interrompre le flux
sanguin et entraîner une anoxie tissulaire, une nécrose, des douleurs,
voire un infarctus. Ces globules rouges en faucille ont également été
identifiés dans les pulpes dentaires.
Par conséquent, des nécroses sur des dents ne présentant ni caries, ni traumatismes
peuvent survenir à la suite d’une obstruction des vaisseaux pulpaires.
Alcaptonurie D’origine familiale et héréditaire, l’alcaptonurie est une maladie qui
ne s’accompagne dans l’enfance d’aucun signe clinique et qui
entraîne l’apparition dans les urines d’alcaptones issues d’un trouble
de la décomposition de la phénylalanine et de la tyrosine. Dans
certains cas, une coloration rougeâtre ou brun-rose (érythrodontie)
des dents définitives peut être observée.
Maladie de Cooley ou b-thalassémie majeure
Cette anémie hémolytique infantile due à de nombreuses anomalies
héréditaires de l’élaboration de l’hémoglobine est transmise selon
un mode autosomique dominant. Les enfants atteints présentent une
hépatosplénomégalie marquée, une cardiomégalie, des anomalies
osseuses et une coloration grise, voire brune des dents.
Syndrome d’Elsahy-Waters = syndrome de Unger-trott = syndrome
branchio-squeletto-génital

Ce syndrome à transmission autosomique récessive (ou peut-être lié
à l’X) associe un crâne brachycéphalique, des troubles oculaires, un
retard mental, des convulsions, des anomalies squelettiques et  maxillaires. Au niveau dentaire, il est décrit une dysplasie dentinaire
ressemblant à une dysplasie de type radiculaire (DDI) ou un
taurodontisme avec souvent une oblitération des chambres
pulpaires.
Syndrome tricho-dento-osseous
Syndrome héréditaire autosomique dominant présentant des
altérations des cheveux et des ongles et de nombreux troubles
dentaires. Au niveau pulpodentinaire, les dents temporaires et
définitives ont de longues cornes pulpaires qui s’étendent jusqu’à la
jonction émail-dentine et comme dans les cas de rachitisme vitamine
D-résistant, une usure de l’émail entraîne des microexpositions
pulpaires et des abcès. La dentine a une épaisseur réduite et présente
des espaces interglobulaires.
Autres syndromes
Le syndrome d’Hallermann-Streiff (oculo-mandibulo-dyscéphalie)
provoque une oblitération pulpaire et une dentinogenèse radiculaire
anormale avec des zones d’ostéodentine.
Le syndrome de Rothmund-Thomson (poïkilodermie congénitale) présente des
oblitérations des chambres pulpaires.
Des hypoplasies dentinaires
sont observées chez les patients atteints de la maladie d’Albers-
Schönberg (ostéopétrose ou maladie des os de marbre).

CARENCES DIÉTÉTIQUES
Déficience en acide ascorbique (scorbut)
L’acide ascorbique (vitamine C) est essentiel pour la biosynthèse et
la sécrétion du collagène, constituant majeur de la matrice
dentinaire. En cas de carence en vitamine C, il est décrit une dentine
déficiente en quantité et en qualité avec des tubuli rares et
irréguliers, des dépôts intrapulpaires et une diminution de la taille
des odontoblastes.
Chez les rats déficients en acide ascorbique, il a été clairement observé une réduction de la formation de
dentine. Deux explications sont suggérées :
une altération de la différenciation des odontoblastes ou une résorption par les
odontoblastes eux-mêmes du collagène anormal.
Carence en phosphate, en calcium, en magnésium
et en vitamine D
Dans les cas d’hypophosphatémieoud’hypovitaminose induites par
un régime alimentaire carencé, des défauts de minéralisation
dentinaire sont toujours décrits.
Les chambres pulpaires sont
anormalement larges et les racines sont courtes chez les patients
présentant une hypocalcémie.
En revanche, chez le rat, une
carence en magnésium induit des défauts de la minéralisation de la
dentine et des calcifications pulpaires.
ACRODYNIE (MALADIE DE SWIFT-FEER
PAR INTOXICATION MERCURIELLE)

INFECTION FONGIQUE (« CANDIDA ALBICANS »)
L’espèce Candida, qui fait partie de la flore normale de la peau, de la
cavité buccale et de l’appareil gastro-intestinal, est la cause la plus
fréquente des infections fongiques chez l’homme. L’augmentation
de l’incidence des infections fongiques et la détection de ce
champignon dans des canaux radiculaires infectésagénéré
un intérêt considérable pour l’étude de son rôle dans les infections
endodontiques. Des études récentes ont montré en microscopie
électronique à balayage que Candida albicans colonise la dentine
et produit des agents collagénolytiques qui dégradent la matrice
dentinaire. De plus, Candida agit sur l’inflammation pulpaire. En
effet, le mannan, un des composants de la surface de Candida, peut
directement ou indirectement activer le système du complément. En
revanche, la sécrétion d’adénosine (facteur de virulence) bloque la
dégranulation des PMN neutrophiles. Enfin, Candida albicans est
résistant aux agents thérapeutiques intracanalaires, ce qui explique
son association aux infections canalaires persistantes.
ZONA
Le zona est une infection secondaire causée par un virus de la
famille Herpesviridae (herpesvirus). L’infection primaire est la
varicelle, maladie de l’enfance caractérisée par une éruption cutanée
et des ulcérations orales et dans laquelle le virus est disséminé par
voie hématogène. Le virus reste à l’état latent dans les ganglions des
nerfs sensoriels et il peut être réactivé lorsque les défenses
immunitaires de l’hôte faiblissent (phase de résurgence). Il se
produit alors une éruption cutanée et/ou muqueuse sur le territoire
du nerf concerné ; 18,5 % des zonas affectent le nerf trijumeau et dans cette localisation, les douleurs sur le territoire du nerf peuvent
simuler une pulpite durant les prodromes (2 à 14 jours avant
l’éruption vésiculaire).
Bien que les mécanismes pathogéniques
soient inconnus, le zona est classiquement rendu responsable de
résorptions radiculaires internes et externes, de minéralisations
importantes des chambres pulpaires,
de pertes de vitalité pulpaire
(non-réponse aux tests électriques)
et d’inflammations pulpaires et/ou apicales.
Le virus n’est pas directement impliqué dans les
pathologies du tissu nerveux dentaire (inflammations pulpaires)
provoquées par le zona du trijumeau, puisqu’il n’est pas décelable
dans les pulpes des dents atteintes.
LÈPRE
La lèpre est une maladie qui touche tous les âges et toutes les races.
Causée par Mycobacterium leprae, elle est transmise par un contact
prolongé.Lalèpre touche d’abord la peau et les muqueuses et est
caractérisée par des lésions pouvant envahir tout le corps (macules,
papules, nodules et plaques). Ses complications les plus fréquentes
sont des pathologies oculaires, une alopécie, des abcès sur les nerfs
périphériques, la tuberculose, un érythème noueux et une
amyloïdose. Des complications orales peuvent apparaître, avec des
ulcères sur le palais, les amygdales et la langue, ainsi que la perte
de plusieurs dents. Des anomalies morphologiques des dents ont
également été notées. Mycobacterium leprae ad’autre part été
retrouvé dans les pulpes dentaires des malades et l’envahissement
pulpaire par la bactérie peut entraîner une nécrose pulpaire, ce qui
peut justifier, soit des dépulpations préventives, soit les extractions
des dents, afind’éviter la contamination des tissus
périmaxillaires.

Traitements et leurs conséquences pulpodentaires
GLUCOCORTICOÏDES (OU GLUCOCORTICOSTÉROÏDES) Les glucocorticoïdes (exemple : prednisone) sont des dérivés
synthétiques des hormones stéroïdes sécrétées par les
corticosurrénales qui exercent des actions multiples ; anti-
inflammatoire, antipyrétique, antiallergique et inhibitrice des
réactions immunitaires.
Après une greffe rénale, l’administration de fortes doses de
prednisone provoque un rétrécissement de la chambre pulpaire par  stimulation de l’activité dentinogénique des odontoblastes.
Cependant, il est difficile de savoir si ces modifications pulpaires
sont dues à la pathologie initiale ou au traitement corticoïde seul.
Une étude récente a montré, chez le rat sain, que les effets dentaires
de l’administration continue de prednisone varient en fonction de
l’état de développement des dents et de la dose de glucocorticoïdes
utilisée. Contrairement aux molaires immatures, la prednisone
provoque sur les molaires matures un épaississement de la dentine
au niveau du plancher pulpaire. Le mode d’action des
glucocorticoïdes ne serait pas direct mais se ferait par l’intermédiaire
des hormones de croissance ; si les odontoblastes et les cellules
pulpaires expriment le récepteur de l’hormone de croissance dans
les dents immatures, dans les dents matures, l’expression n’est
observable qu’après traitement à la prednisone.

TÉTRACYCLINE
La tétracycline produit une coloration intense (grisâtre, jaunâtre,
verdâtreoubrunâtre) des dents. L’incorporation des pigments
fluorescents dans les tissus calcifiés se fait par leur affinité pour les
cations polyvalents et par la formation de complexes insolubles avec
les cristaux de la dentine. Au fur et à mesure de l’exposition des
dents à la lumière du jour, la couleur jaune se change en gris ou
brun et la fluorescence diminue graduellement. La tétracycline
passant la barrière placentaire, les deux dentures peuvent être
atteintes puisque la coloration marque la dentine en formation lors
de la prise du traitement antibiotique.
SUPPLÉMENTS FLUORÉS
Des suppléments fluorés peuvent trouver une place en prévention
de la carie, pendant la minéralisation des dents. La posologie doit
s’adapter à l’enfant receveur et faire l’objet d’un suivi. Une étude
récente
compare les pulpes de molaires temporaires non cariées
de deux groupes d’enfants. L’un est non supplémenté en fluorures,
l’autre est constitué d’enfants ayant reçu des comprimés fluorésde
la naissance à 10 ans, à des doses supérieures aux recommandations
actuelles (0,25 mg/j de 0 à 24 mois, 0,50 mg/j de 25 à 35 mois,
0,75 mg/j de 3 à 6 ans, 1 mg/j après 6 ans). L’analyse en microscopie
photonique des pulpes dentaires révèle un nombre significativement
plus élevé de calcifications pulpaires dans le « groupe fluoré».Ces
calcifications sont préférentiellement localisées au niveau du
plancher pulpaire et sur les parois radiculaires et sont constituées
parfois d’un tissu proche d’une fibrodentine. La présence de
calcifications pulpaires de ce type n’est pas toujours retrouvée. La
notion de susceptibilité individuelle entre en compte, ainsi que la
régularité de la prise des comprimés, leur période de consommation,
la posologie proposée, le stade de développement des cellules
odontoblastiques au début de la prise de fluorures. Ainsi, les
préodontoblastes sont plus sensibles à la présence de fluorures que
les odontoblastes matures. De plus, in vitro, l’exposition de dents de
rat à de fortes concentrations de fluorures entraîne des modifications
des constituants de la matrice extracellulaire de la dentine qui
pourraient perturber sa minéralisation.
TRAITEMENTS ANTICANCÉREUX
(RADIOTHÉRAPIE ET CHIMIOTHÉRAPIE)

La radiothérapie utilisée en oncologie pédiatrique est connue pour
avoir un effet sur les dents en développement. La sévérité des
conséquences dépend du stade embryologique dans lequel se
trouvent des cellules odontogéniques au moment du traitement et
de la dose d’irradiation. La dentine des dents situées dans la zone
d’irradiation présente des anomalies de structure de type ostéoïde.
Les effets de la chimiothérapie sur la dentine sont variables en
fonction des drogues utilisées, de la fréquence des cures et de l’état
de différenciation des cellules odontogéniques et de leur
susceptibilité au moment du traitement.
Il existe des différences
dans la cytotoxicité et le caractère réversible des dommages
pulpodentinaires entre les différentes drogues anticancéreuses.
L’actinomycine D, la daunorubicine et la vincristine sont très
toxiques alors que le méthotrexate semble non toxique.
Une étude
chez le hamster montre que l’actinomycine D provoque des défauts
dentaires irréversibles lorsque le traitement est administré pendant
la phase de formation des dents. Les cellules les plus sensibles sont
les préodontoblastes non différenciés, puis les préaméloblastes. Les
odontoblastes matures ne semblent pas touchés par ce traitement.
Il est probable que les préodontoblastes en phase proliférative soient
plus sensibles au processus d’apoptose induit par l’actinomycine D
que les cellules plus différenciées.
Une neutropénie a été induite chez des rats en leur injectant un
agent immunosuppresseur et anticarcinogène habituellement utilisé
dans les traitements de la leucémie aiguë et du carcinome (le
méthotrexate). Les études histologiques montrent qu’à la suite d’une
exposition pulpaire, la nécrose pulpaire est plus importante dans le
groupe des rats expérimentaux que dans le groupe contrôle, alors
qu’il n’y a pas de différence en ce qui concerne les lésions
périapicales. La neutropénie induite par le traitement augmente la
réaction nécrotique consécutive à une exposition pulpaire
expérimentale chez le rat.
Le rôle des PMN neutrophiles dans
l’inflammation pulpaire (phagocytose des bactéries et destruction
tissulaire lors de la dégranulation) est largement décrit dans la
littérature. Cependant, les conséquences d’une modification du
nombre des PMN neutrophiles sur la réponse inflammatoire de la
pulpe ont été peu observées.

Conclusion
Cette revue de la littérature récente montre que les interférences entre la
dent, en particulier l’organe pulpodentinaire, et l’organisme sont
nombreuses et variées, mais parfois encore mal connues. De vastes
champs de recherche, tant fondamentale que clinique, sont donc ouverts
pour tenter de mieux comprendre les mécanismes pathogéniques de ces
inter-relations. Par ailleurs, la survenue de manifestations dentaires
sans étiologie locale peut parfois permettre d’évoquer un diagnostic de
pathologies générales passées inaperçues jusqu’alors. De même, face
aux conséquences prévisibles sur l’organe pulpodentinaire de certaines
maladies générales, des traitements dentaires précoces devraient sans
doute être discutés (dépulpations préventives, par exemple), tandis que
l’existence de maladies générales connues pourrait dans certains cas
contre-indiquer des traitements dentaires susceptibles d’exacerber leurs
conséquences locales néfastes (traitements en orthopédie dentofaciale et
pathologies rénales, par exemple). La médecine dentaire est une
composante de la médecine générale et ne doit pas être considérée
comme le bastion isolé des seuls odontostomatologistes.
Elle s’accompagne de troubles neurologiques et cardiaques,
d’atteintes cutanées, de stomatite et au niveau dentaire d’un
élargissement de la prédentine, d’une dentine très irrégulière
ondulée, au niveau apical et au niveau pulpaire, d’hémorragies
massives.

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