vendredi 18 mars 2011

Polytraumatismes des dents et du parodonte (1)

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Si deux enfants sur dix subissent un traumatisme avant la fin de leur scolarité, déjà trois
enfants sur dix ont un accident en denture temporaire. La traumatologie de la sphère
orofaciale est très présente dans notre exercice quotidien et constitue une réelle urgence.
La majorité des traumatismes intéresse le bloc incisivocanin supérieur. Les étiologies sont
multiples. En denture temporaire, elles sont le plus souvent liées à l’apprentissage du très
jeune enfant à la marche ou aux accidents de la cour de récréation. En denture
permanente, les  pratiques sportives, les accidents ou les rixes sont prédominants.
Cependant lors de son examen, le praticien ne devra jamais perdre de vue les sévices
corporels. Des conditions morphologiques telles que la protrusion accentuée des incisives
supérieures et une protection labiale insuffisante peuvent être des facteurs de risque.
Il est impératif d’évaluer le plus précisément les atteintes qui peuvent être dentaires
(fractures coronaires et/ou radiculaires), mais également les tissus de soutien (parodonte
et osseux). Il faut choisir immédiatement la meilleure option thérapeutique qui conditionne
le plus souvent le pronostic à long terme. Le traitement nécessite le plus souvent une
prise en charge pluridisciplinaire, incluant endodontie, orthodontie, chirurgie et prothèse.

INTRODUCTION
L’examen clinique est primordial et détermine le diagnostic, le plan de traitement et le
pronostic
. Il est nécessaire d’évaluer les dommages subis par les tissus
dentaires et environnants (tissu pulpaire, ligament parodontal, os alvéolaire). Il faut tenir compte de l’incidence que peut avoir le facteur temps sur le pronostic quand le
laps de temps écoulé entre le traumatisme et la consultation est important.
Le visage est nettoyé à l’aide d’une éponge imbibée d’un antiseptique doux afin de
visualiser l’étendue réelle du traumatisme. Dans le cas de souillures plus profondes, après
anesthésie des muqueuses à l’aide d’un spray anesthésiant et protection des narines, le
praticien élimine les corps étrangers au moyen d’un petit excavateur.
La cavité buccale est rincée.

ANAMNÈSE
L’anamnèse doit préciser les circonstances du traumatisme, guider l’examen clinique et
orienter le choix thérapeutique.
Comment est survenu le traumatisme ? La réponse guide le praticien dans l’examen de
zones plus précises. Un choc direct sur le menton peut entraîner non seulement une
fracture incisive, mais peut également avoir des répercussions sur le secteur molaire-
prémolaire ainsi qu’au niveau de l’articulation temporomandibulaire (ATM).
Où s’est produit le choc ? La réponse permet d’évaluer les risques d’une contamination et
d’instaurer la nécessité éventuelle d’une antibiothérapie et/ou d’une vaccination antitétanique.
Quand le traumatisme a-t-il eu lieu ? Cette question introduit le facteur temps, élément
décisif, qui influe de façon très significative sur la mise en oeuvre de certaines
thérapeutiques  (thérapeutiques  pulpaires,  repositionnement  après  luxation, réimplantation).
Si, chez l’enfant mineur, le praticien note une non-concordance entre les réponses à ses
questions et les plaies observées, celui-ci ne doit jamais oublier la possibilité d’être devant
un patient qui présente les symptômes des " enfants battus ". Il doit en avertir les
autorités médicales ou les administrations chargées des actions sanitaires et sociales (la loi
du 2 février 1981 et l’article 45 du code de déontologie médicale permettent de signaler
une telle situation sans s’exposer aux peines relatives à la levée du secret professionnel ).
L’existence d’une période d’inconscience, de maux de tête, de vomissements ou de
troubles de la vue peut signer un traumatisme crânien.
Le questionnaire médical évalue l’existence d’antécédents médicaux (troubles sanguins,
cardiovasculaires, épileptiques, diabète et/ou allergies), pouvant contre-indiquer certaines
manoeuvres thérapeutiques, guide dans le choix de l’anesthésique, et précise la
prescription ou non de l’antibiothérapie la plus appropriée.
La date des vaccinations, notamment la vaccination antitétanique en cas de plaies souillées
indique la nécessité, ou non d’un sérum antitétanique.
L’existence éventuelle de chocs antérieurs au traumatisme est capitale car elle peut influer
sur le pronostic.
L’âge du patient est essentiel. Le pronostic de certaines thérapeutiques (notamment de
conservation pulpaire) peut y être directement corrélé. Ainsi, les dents immatures ont un
potentiel de réparation plus important, mais leurs racines sont plus courtes, aussi, un
traumatisme parodontal est souvent surajouté au traumatisme dentaire.

EXAMEN CLINIQUE
En tout premier lieu, l’évaluation globale du patient permet de déceler l’existence
de chocs ou de traumatismes cérébraux. Le praticien doit vérifier le réflexe
pupillaire, la tension, le pouls, l’existence de saignements de nez et/ou d’oreille.
Examen exobuccal
Les plaies de la face, des lèvres, du menton sont inspectées afin de déterminer la
nécessité ou non de points de suture.
En cas de douleur, la palpation des rebords osseux (nez, massif sous-orbitaire,
symphyse, angle mandibulaire) suggère la présence éventuelle de fractures osseuses.
Une limitation, une déviation ou une déflection de l’ouverture buccale peuvent
indiquer une fracture condylienne ou un déplacement discal.

Examen endobuccal
Examen des tissus mous : il faut évaluer le type et l’étendue des lésions
traumatiques des muqueuses, notamment l’existence d’une lacération des freins,
ou la présence d’hématomes.
La palpation minutieuse des lèvres permet de déceler la présence éventuelle de
corps étrangers (graviers ou fragments dentaires).
Examen de l’occlusion : des anomalies de la position d’intercuspidation
maximale peuvent être détectées et associées à des déplacements dentaires, des
fractures coronoradiculaires, et/ou des fractures osseuses.
Examen des tissus durs : un choc direct entraîne le plus fréquemment des
fractures coronaires avec ou sans exposition du tissu pulpaire. En cas de chocs
indirects, il faut rechercher la présence ou non de fractures coronoradiculaires au
niveau des secteurs molaires.
Les fêlures de l’émail sont mises en évidence par transillumination, avec une
lampe à photopolymériser en tenant le rayon perpendiculaire à l’axe de la dent,
sur la muqueuse vestibulaire, au niveau de la gencive attachée.
Le changement de teinte est apprécié par rapport aux dents adjacentes et/ou
controlatérales. La décoloration, confirmée par transillumination., est souvent
plus visible sur la face palatine de la dent, mais ne doit pas conduire d’emblée à
une dépulpation.
Les déplacements dentaires peuvent être de trois types : intrusion, extrusion,
déplacement vestibulaire ou lingual. L’appréciation de l’amplitude est plus
difficile en dentition mixte.
Trois tests sont à effectuer, mobilité, vitalité et percussion :
une mobilité en direction axiale, indique une section apicale de la
vascularisation pulpaire ; une mobilité dans le sens horizontal signe soit une
fracture alvéolaire (si la mobilité horizontale d’une dent entraîne la mobilité
des dents adjacentes), soit une fracture radiculaire ; le praticien ne doit
jamais oublier que chez l’enfant, il existe une mobilité physiologique surtout  dans le secteur incisif ;
une percussion effectuée dans le sens vertical et horizontal à l’aide
du manche d’un miroir chez l’adulte ou du doigt chez l’enfant, permet
d’évaluer la sensibilité et le son ; une sensibilité à la percussion axiale révèle
une atteinte du ligament parodontal, et/ou du réseau vasculaire pulpaire ; un
son métallique lors de la percussion horizontale  existe le plus souvent lors
d’une intrusion ou d’une luxation latérale ; ce signe clinique, réévalué lors des
séances de rappel, permet de faire un diagnostic d’ankylose ;  un son sourd
diagnostique une subluxation ou une extrusion ;
l’évaluation de la sensibilité thermique
se fait soit  avec le
dichlorofluorométhane (Pulpofluorane-Septodont®) appliqué sur la dent à
l’aide d’une boulette de coton, soit au moyen d’une gutta percha réchauffée.
Ces tests peuvent être complétés par les tests électrométriques (vitality scanner-
Analytic technology) et permettent de mesurer le seuil de réponse.
Tous ces tests ne font qu’évaluer la réactivité des éléments sensoriels. Le laser
doppler récemment introduit, évalue la vitalité du tissu pulpaire, mais cette
méthode reste encore expérimentale .
Si les tests de sensibilité sont effectués immédiatement après le traumatisme,
une " fausse " réponse négative peut être enregistrée, dûe à la sidération  du
paquet vasculonerveux. Celle-ci ne doit pas entraîner une décision d’intervention
endodontique immédiate, car certaines dents peuvent répondre positivement
plusieurs mois après le traumatisme .

EXAMEN RADIOGRAPHIQUE
Complément indispensable à l’examen clinique, il permet de vérifier le stade de
développement radiculaire, la présence ou non de fractures radiculaires et
l’atteinte des structures parodontales.
L’examen radiographique doit être reproductible dans le temps lors des séances
de rappel. Il est donc nécessaire d’utiliser un angulateur et de noter l’incidence
du rayon utilisée lors de la première séance.
Toutes les dents de la région traumatisée doivent être radiographiées.
La recherche des corps étrangers s’effectue avec un film (no 0 chez les jeunes
enfants et no 2 pour les adultes) interposé entre les lèvres et les dents (un quart
à un demi du temps d’exposition normal).
Un film occlusal  (film no 2 en denture temporaire et no 4 en denture
permanente) met en évidence le décalage existant entre la dent et l’alvéole. Il
permet ainsi d’évaluer les luxations latérales, les fractures radiculaires et les
fractures alvéolaires.
Dans certaines situations, plusieurs incidences radiographiques sont nécessaires
lors de la prise des radiographies rétroalvéolaires (no 0 pour les dents
temporaires et no 1 pour les dents permanentes). Il faut combiner une incidence
orthocentrée et deux clichés excentrés latéralement de 20° en mésial et 20° en
distal. Ces incidences permettant ainsi de mettre en évidence l’étendue réelle du traumatisme .
D’autres radiographies peuvent être nécessaires au diagnostic :
panoramique ; dans les cas de suspicion de fractures osseuses des bases
maxillaires ou condyliennes (dans ce dernier cas, la radiographie doit être centrée sur les ATM);

une radiographie transcrânienne oblique ;
le cliché latéral  nécessaire en cas de suspicion de fracture dans la
région condylienne, ou chez le très jeune enfant (film no 4) dans les cas
d’ingression (le temps d’exposition doit être doublé) ;
radiographies du massif facial dans les cas de traumatismes sévères.
Le certificat médico-légal initial doit reprendre toutes les constatations cliniques
et radiologiques observées le jour même. Il doit envisager tous les traitements
immédiats, à court, moyen et long terme. Le praticien doit noter toutes les
complications pouvant résulter du traumatisme. Ceci est primordial pour les
traumatismes en denture temporaire (atteinte du germe successionnel) et en
dentition mixte (prothèses transitoires).
Dans un but médico-légal, il est recommandé d’effectuer des photographies.

FRACTURES CORONAIRES
Du point de vue épidémiologique, ce sont les accidents les plus fréquents du bloc
incisif : ils représentent 26 à 76 % des traumatismes en denture permanente, et
de 4 à 38 % en denture temporaire.
Fractures coronaires sans exposition pulpaire Fêlures Provoquées par un choc direct sur l’émail, elles sont fréquentes, mais le plus
souvent négligées. Apparaissant telles des craquelures au niveau de l’émail, sans
traverser la jonction amélodentinaire et sans perte de substance, elles sont
souvent associées à d’autres traumatismes. Elles sont mises en évidence par
transillumination
.
Les signes cliniques sont souvent inexistants, le patient peut se plaindre d’une
légère sensibilité au froid.
La thérapeutique consiste en l’abstention ou en la pose d’un sealant au niveau du
trait de la fêlure. Le pronostic est excellent .


Fractures de l’émail
La perte de structure est peu étendue, toutefois elle peut être associée à un
traumatisme des tissus de soutien. Les tests de vitalité sont positifs, la sensibilité
à la percussion peut provoquer une légère douleur.
La thérapeutique
consiste en une coronoplastie des bords d’émail. Par souci
d’esthétique, la dent controlatérale peut être retouchée. Pour éliminer une
éventuelle sensibilité, on peut appliquer soit un vernis fluoré soit un sealant.
Le pronostic est excellent. Les risques de nécrose pulpaire représentent 0,2 à 1 % des cas .

Fractures coronaires amélodentinaires
On observe une perte de substance plus ou moins étendue. Elles peuvent être
associées à une atteinte des tissus de soutien.
Les signes cliniques sont proportionnels à la sévérité du traumatisme. On peut
observer une hyperesthésie dentinaire associée ou non à une douleur lors de la mastication.
Dans certains cas où la perte de substance est importante, on doit instaurer un
traitement immédiat pour protéger le tissu pulpaire des chocs thermiques, ou de
l’invasion bactérienne. La protection dentinopulpaire est effectuée à l’aide d’un
ciment à base d’hydroxyde de calcium.
La  restauration  peut  se  faire  à  l’aide  du  collage  d’un  composite
photopolymérisant (les études cliniques montrent 92 % de l’intégrité des
composites, après 3 ans ; 65 %, après 5 ans, et 40 %, après 10 ans). Certains
auteurs préconisent le collage du morceau fracturé  . 
Cette technique a été développée à partir de 1984 grâce à l’apparition des systèmes
d’adhésion dentinaire. Pour se faire, le morceau fracturé doit s’adapter
parfaitement au trait de fracture. Cette technique peut être immédiate (si le trait
de fracture n’est pas trop proche du tissu pulpaire), ou être différée (le morceau
est alors conservé dans du sérum physiologique au réfrigérateur à 4 °C). Les
premières études scandinaves montrent qu’à 5 ans, 50 % des fragments collés
sont toujours en place .
Andreasen préconise la confection de facette pour
augmenter le force de collage entre les deux fragments .
Le pronostic est favorable, le risque de nécrose pulpaire varie de 1 à 6 % et il
dépend de facteurs tels que les traumatismes parodontaux associés, le stade du
développement radiculaire, la proximité du trait de fracture et du tissu pulpaire,
et le traitement effectué .

Fractures coronaires intéressant le tissu pulpaire
Ces traumatismes peuvent entraîner différents degrés d’exposition pulpaire, et la
décision du traitement va dépendre :
du stade d’évolution radiculaire ;
de la taille de l’exposition ; du laps de temps écoulé entre le moment du traumatisme et la consultation.

Dents matures
Si l’exposition est minime (inférieure à 1 mm) et récente (moins de 3 h), on peut
envisager de réaliser un coiffage direct. Mais le pronostic est peu favorable (cette
technique est considérée plutôt comme étant un traitement d’urgence).
Si l’exposition pulpaire est plus étendue et plus ancienne, le traitement
endodontique conventionnel est effectué. Cette obturation définitive est précédée
par une phase d’obturation intermédiaire avec de l’hydroxyde de calcium, en cas
de présence de résorptions de surface et/ou inflammatoires.

Dents immatures
Techniques d’apexogenèse
L’objectif majeur dans le cas des dents immatures est la conservation de la
vitalité pulpaire, afin de permettre l’édification radiculaire. Plusieurs techniques
sont possibles, elles sont toutes conditionnées par la taille de l’exposition
pulpaire et le laps de temps écoulé entre le moment du traumatisme et la
consultation.
Coiffage direct Il est indiqué dans les cas d’exposition minime (inférieure à 1 mm) et lorsque le
laps de temps est inférieur à 24 heures entre le moment du traumatisme et de la
consultation.
La pulpe ne présente pas d’inflammation, et les dommages créés par le
traumatisme au tissu pulpaire sont superficiels.
Après anesthésie et pose du champ opératoire, la plaie est nettoyée (sérum
physiologique stérile). L’hémostase doit se faire physiologiquement (ne pas
utiliser de topiques hémostatiques). La pulpe est recouverte sans exercer de
pression d’un hydroxyde de calcium en pâte (Pulpdent®, Calasept®) .
La dentine est recouverte d’un hydroxyde de calcium en base et/ou d’un verre
ionomère. On réalise dans la séance, une restauration coronaire la plus étanche possible.
Le suivi postopératoire s’effectue à 1 semaine (il n’existe généralement aucun
symptôme postopératoire, et les tests de vitalité pulpaire sont positifs), à 4
semaines (la présence d’un pont dentinaire peut se visualiser à l’examen
radiographique). Une surveillance régulière de la vitalité pulpaire doit être
effectuée jusqu’à la mise en place de la jonction cémentodentinaire et pendant 3
ans au moins.
Le pronostic est bon et varie selon les études cliniques de 71 à 88 %.
Pulpotomie partielle
Elle consiste à agrandir la brèche dentinaire et à enlever une partie minime de la
pulpe camérale sur une hauteur de 2 millimètres. Cette thérapeutique est
indiquée dans les cas d’exposition pulpaire minime et si le laps de temps dépasse
48 heures entre le moment du traumatisme et la consultation.
Après l’anesthésie et la pose du champ opératoire, la plaie pulpaire et la dentine
sont détergées avec de la chlorexhidine à 0.5 %. Une amputation de la pulpe sur
une hauteur de 2 mm avec une fraise diamantée stérile, de forme cylindrique,
montée sur turbine et sans spray, mais refroidie en permanence à l’aide d’un jet
de sérum physiologique stérile ou du contenu d’une cartouche d’anesthésique
sans vasoconstricteur. Après contrôle de l’hémostase et lavage de la plaie avec
du sérum physiologique stérile (afin d’éliminer le caillot), la plaie est séchée à
l’aide de grosses pointes de papier stériles montées à l’envers. Le reste de la
thérapeutique et le suivi opératoire sont identiques à celle du coiffage direct.
Le pronostic est excellent, les chances de survie pulpaire varient entre 94 et 96 % .

Pulpotomie cervicale Cette technique consiste à amputer tout le tissu de la chambre pulpaire nécrosé
dont le réseau vasculaire est perturbé, afin de pouvoir coiffer une pulpe saine.
Elle est indiquée  pour les dents immatures vivantes, dont l’exposition est
importante et le laps de temps entre le moment du traumatisme et la
consultation supérieur à 3 jours.
Après anesthésie et pose du champ opératoire, la dent est nettoyée avec un
antiseptique (Mercryl®).
L’amputation de la pulpe camérale à l’aide d’une grosse fraise boule stérile à long col en acier neuve no 6 ou 7 et montée sur un contre-angle
tournant à 6 000 tours par minute. Après vérification de l’hémostase et
rinçage avec du sérum physiologique stérile pour éliminer le caillot, le produit de
coiffage est déposé sans compression au contact du tissu pulpaire. La cavité est obturée et la dent peut être reconstituée dans la séance.
La surveillance radiographique s’effectue jusqu’à la fermeture radiculaire. Les
tests de vitalité pulpaire sont difficiles à interpréter, du fait du coiffage en
profondeur. La réparation peut être évaluée radiographiquement dès la
quatrième semaine.
Les chances de survie pulpaire sont de 72 à 79 % .
Du fait des complications pulpaires qui peuvent survenir (résorption, dégénérescence calcique et nécrose),
cette technique doit être considérée comme étant un traitement temporaire
induisant l’évolution radiculaire et permettant l’obturation canalaire définitive à
la gutta-percha.
L’évaluation clinique de la guérison pulpaire
peut se faire par : l’absence de
symptômes cliniques, l’absence de pathologies intra- ou périradiculaires, la
poursuite du développement radiculaire des dents permanentes immatures, la
présence d’un pont dentinaire visible à la radiographie, l’existence d’une
sensibilité aux tests électriques. La surveillance de cette thérapeutique doit se
faire au moins pendant 3 ans.

Technique d’apexification
La technique d’apexification vise à provoquer la fermeture de l’apex sans
allongement radiculaire et ce par la formation d’une barrière calcifiée.
On peut observer deux types de réparations :
si le stade d’évolution radiculaire correspond à l’âge dentaire du patient
(un enfant, en l’occurrence), certaines cellules de la gaine d’Hertwig peuvent
demeurer vivantes, et l’allongement radiculaire peut alors s’effectuer ;
si le stade d’évolution ne correspond plus à l’âge dentaire du patient, la
racine est alors " figée " au stade où la nécrose pulpaire est survenue.
Lors de l’examen clinique, la dent ne répond pas aux tests de vitalité, le test à la
percussion peut être douloureux, on peut observer l’existence  d’un gonflement
ou d’une fistule dans le sillon vestibulaire.
L’examen radiographique permet d’établir le stade d’évolution de la racine et de
préciser la présence ou non d’éventuelles atteintes périapicales.
L’anesthésie n’est pas nécessaire sauf pour la  pose du champ opératoire, une
cavité d’accès assez large est pratiquée (les cornes pulpaires des dents
immatures descendent près du bord libre et celles-ci doivent être débarrassées
de tout contenu tissulaire nécrotique, afin d’éviter une dyschromie ultérieure de
la dent). La longueur canalaire est tout d’abord effectuée sur le cliché
radiographique depuis le bord libre jusqu’à la paroi radiculaire la plus courte à
l’apex. Cette longueur est reportée à l’intérieur du canal avec une lime no 25. Le
parage canalaire s’effectue sans limage excessif des parois radiculaires, sous
irrigation constante de sérum physiologique ou d’hypochlorite de sodium à 2,5
%. Après assèchement au moyen de grosses pointes de papier stérile dont la
longueur est préétablie par rapport à la longueur de travail, le canal est rempli
avec de l’hydroxyde de calcium.
L’hydroxyde de calcium utilisé peut se présenter soit en poudre, mélangé
extemporanément avec un liquide stérile (eau bidistillée, sérum physiologique
stérile ou anesthésique sans vasoconstricteur), soit sous forme de pâte
(Pulpdent®, Calcipulpe®, Hypocal
®, Calasept®) et introduit dans le canal à l’aide
d’un bourre-pâte, type lentulo.
Un cliché radiographique est effectué afin de vérifier la densité de l’obturation
(si un dépassement apical survient, cela n’entraîne aucun retard dans la réparation car le matériau est rapidement résorbé.).
La chambre pulpaire est ensuite obturée de façon hermétique
(l’étanchéité de cette obturation temporaire est un des paramètres essentiels de succès de la technique d’apexification).
À une semaine, les signes cliniques doivent avoir disparu, et à 2 semaines, un
cliché radiographique est pris. Si la densité de l’obturation est inférieure au
premier cliché, on pourra renouveler l’obturation. Toutefois, des changements
répétés du produit perturbent le processus de réparation. Le suivi radiologique
tous les 3 mois permet de contrôler la densité de l’obturation, jusqu’à la mise en
évidence de la barrière apicale, ce qui peut s’effectuer dans un délai de 12 à 18
mois, en fonction de la taille du foramen et l’importance de la lésion périapicale.
Les critères d’obturation définitive sont :
une dent asymptomatique qui présente une guérison des phénomènes périapicaux ;
une visualisation radiographique de la barrière apicale ;
la persistance de la densité de l’obturation à l’hydroxyde de calcium ;
l’objectivation clinique de la barrière apicale, qui se fait au moyen d’une
broche de 15 à 20/100e.
L’obturation définitive est effectuée par condensation latérale ou verticale de la
gutta-percha. Le suivi radiographique doit se faire au bout de 6 mois, 1 an, et pendant 4 ans.
Le pronostic est excellent, si la méthodologie est bien suivie, puisque les études
cliniques montrent 90 % de guérison en cas de lésion périapicale .
Lorsqu’une ou plusieurs dents doivent subir un traitement d’apexification, il ne
faut pas appliquer de forces orthodontiques sur celles-ci, et ce jusqu’à
l’objectivation clinique et radiologique de la barrière apicale. Lorsque
l’apexification est réussie, et que le traitement orthodontique doit être
commencé, ou repris, il est recommander de laisser l’hydroxyde de calcium en
place dans le canal, et ce tout le temps du traitement. Le traitement définitif à la
gutta-percha ne doit être effectué que 6 mois après la fin du déplacement
dentaire qui entraîne un remaniement de la zone apicale des dents déplacées.

FRACTURES CORONORADICULAIRES
Du point de vue épidémiologique, elles représentent environ 5 % des
traumatismes en denture permanente et 2 % en denture temporaire .
Tous les tissus dentaires sont concernés : émail, dentine, cément et le plus souvent la pulpe.
On peut les classer en deux catégories selon l’implication du tissu pulpaire :
les fractures coronoradiculaires simples, sans atteinte du tissu pulpaire ;
rares, elles ne représentent que 1 % des fractures coronoradiculaires ;
les fractures coronoradiculaires compliquées, où le tissu pulpaire est concerné ; c’est la majorité de ce type de traumatisme.
Dans la région antérieure, un choc direct entraîne selon sa direction, une fracture horizontale ou oblique.
Dans la région postérieure (prémolaire ou molaire), c’est plutôt un choc indirect
qui est responsable de ce type de fracture par l’entrechoquement brutal des arcades entre elles.
L’examen clinique peut montrer un trait de fracture le plus souvent unique, il peut cependant être multiple (fractures comminutives).
La symptomatologie clinique est peu importante. Seule la mastication mobilise
les morceaux, la douleur n’est pas spontanée mais fonctionnelle.
L’interprétation de l’examen radiologique peut s’avérer difficile. Il est préférable
d’utiliser plusieurs incidences et notamment des clichés décentrés mésialement
et distalement.

Traitement
Fractures coronoradiculaires simples
Si le trait de fracture est superficiel, le retrait du fragment mobile est suivi d’un
polissage de la dent et de conseils d’hygiène.
On peut prescrire des bains de bouche à la chlorhexidine pendant 1 semaine. La restauration de la dent à l’aide
d’un composite photopolymérisant ou par collage du fragment peut alors s’effectuer.
Si le trait de fracture est plus profond, mais avec possibilité d’obtenir une limite
supragingivale après gingivoplastie et/ou ostéotomie, le praticien peut dégager
le trait de fracture par gingivoplastie et/ou ostéotomie, polir la surface
dentinaire, mettre en place un hydroxyde de calcium sur la partie dentinaire qui
peut être recouvert d’une restauration temporaire 2 ou 3 semaines plus tard.
La cicatrisation gingivale étant obtenue, la dent est reconstituée définitivement.

Fractures coronoradiculaires compliquées Il faut traiter individuellement le problème pulpaire, le problème parodontal et
réaliser, dans les meilleures conditions possibles, une restauration prothétique.
L’ablation du fragment coronaire peut être suivie d’une extrusion chirurgicale
(réservée aux dents définitives matures seulement), ayant pour but de
repositionner le trait de fracture en position supragingivale.
Une contention souple est effectuée 10 jours plus tard, le tissu pulpaire est extrait, et la dent
obturée de manière conventionnelle. La restauration prothétique peut être alors
envisagée. Cette méthode est rapide. Toutefois, on observe fréquemment des
résorptions de surface secondaires.
L’extrusion peut également se faire par une traction orthodontique qui doit
s’effectuer pendant 2 à 3 semaines, et mise en place d’une contention pendant 2
à 3 mois avant restauration prothétique .
Dans les cas  de dent immature, la dent peut être conservée vivante, et on observe peu ou pas de
résorption de surface. Toutefois, la durée du traitement est plus longue et la
thérapeutique plus onéreuse.
Les dents sont contrôlées à 2 mois, 6 mois et 1 an après la fin du traitement. Le
pronostic dépend des pronostics pulpaires, parodontaux et prothétiques.


FRACTURES RADICULAIRES
Les fractures radiculaires sont des traumatismes observés surtout dans les cas de dents matures.
En effet, dans des conditions traumatiques identiques, les dents immatures, en raison de la laxité parodontale, présentent plus d’accidents
de type luxation ou expulsion. Elles représentent entre 0,5 et 7 % des traumatismes en denture permanente et 2 à 4 % en denture temporaire .
L’expression clinique des fractures radiculaires est diverse et dépend de la
localisation du trait de fracture. La dent peut paraître soit en position normale, extrusée ou déplacée.
Le degré de mobilité dépend de la sévérité du traumatisme et/ou de la
localisation du trait de fracture. Elle est importante si le trait de fracture est situé
au tiers coronaire. La dent présente peu ou pas de mobilité, si le trait de fracture
est situé au tiers apical. Dans ce dernier cas, la fracture radiculaire est souvent
une découverte de l’examen radiographique.
Le test de vitalité pulpaire peut être positif ou négatif.
Mais il faut attendre 3 semaines voire 1 mois, avant de décider d’instaurer un traitement endodontique.
Le test à la percussion peut donner un son métallique marquant la luxation
latérale du fragment coronaire.
On peut observer une décoloration de la couronne pouvant être réversible et qui
ne doit pas entraîner une dévitalisation systématique.
L’examen radiographique requiert plusieurs clichés :
un cliché occlusal objectivant les fractures obliques du tiers apical ;
un cliché rétroalvéolaire permettant d’observer les fractures plus coronaires.
Le trait de fracture n’est visible à la radiographie que si l’angulation verticale du
rayon est dirigée entre 15 à 20 ° par rapport au trait de fracture.
Le traitement dépend de la situation plus ou moins coronaire du trait de
fracture et de sa communication avec la cavité buccale.
En cas de communication, le fragment coronaire est extrait, et le fragment apical
peut,  en  fonction  de  sa  longueur,  soit  être  extrait,  soit  extrusé
orthodontiquement puis restauré prothétiquement.
En cas d’absence de communication, le trait de fracture est en tout premier lieu
réduit, les deux fragments sont réalignés et enfin, une contention semi-rigide est
mise en place pendant 3 mois au minimum.
L’extraction du fragment apical doit se faire en évitant de sacrifier l’os alvéolaire
vestibulaire et palatin. Si l’extraction est impossible par voie alvéolaire, il faut
effectuer un lambeau, puis une incision osseuse au niveau de l’apex résiduel et "
pousser " le fragment apical hors de l’alvéole.
Le suivi doit être effectué à 3 semaines et enfin à 3 mois. Si les tests pulpaires
sont positifs, la contention peut être retirée au bout de 3 à 6 mois.
Le pronostic
dépend du stade de développement radiculaire, du
déplacement du fragment coronaire et de la réponse du tissu pulpaire qui en
résulte. Après le traumatisme, le tissu pulpaire du fragment coronaire peut soit
rester vivant, soit se revasculariser, soit se nécroser.
Un traumatisme de faible intensité n’occasionne pas de déplacement, et donc, la
guérison s’effectue par interposition de tissu dur.
Dans le cas d’un traumatisme de moyenne intensité, on observe une légère
mobilité,  et  un  dommage  pulpaire  qui  permet  généralement  une
revascularisation. On objective alors une guérison par interposition de tissu
conjonctif.
Un traumatisme sévère entraîne une mobilité importante, puis une nécrose
pulpaire et une non-guérison du trait de fracture par interposition entre les deux
fragments d’un tissu de granulation.
Les complications des fractures radiculaires peuvent être soit :
une complication parodontale par interposition de tissu de granulation ; ce
tissu de granulation résulte généralement de la nécrose pulpaire et/ou de la
contamination bactérienne du trait de fracture ; une contention rigide peut
également être à l’origine de cette non-guérison par déplacement du fragment coronaire ;
une complication pulpaire  :
l’oblitération canalaire qui survient entre 73 et 86 % des cas ;
la nécrose pulpaire se produit dans 20 à 44 % des cas de fractures
radiculaires ; elle peut se confiner au seul fragment coronaire ou au
contraire intéresser les deux fragments ;
les résorptions radiculaires apparaissent dans 60 % des cas et
peuvent s’objectiver 1 an après le traumatisme ; on peut observer des
résorptions de surface, des ankyloses, et des résorptions internes.

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